Qu'est ce que l'insulinothérapie fonctionnelle ?
On désigne sous ce terme une technique récente par laquelle on tente de déterminer "au plus près du patient" les doses d'insuline dont il a besoin. Cette technique s'adapte aux schémas insuliniques qui comprennent l'association d'une insuline basale à des insulines rapides administrées avant les repas, schémas aussi appelés basal-bolus et que nous avons décrits dans un autre chapitre ( 2 lentes et 3 rapides ; 1 lente et 3 rapides ; pompe à insuline)
Beaucoup de services de diabétologie proposent à leurs patients des "stages d'insulinothérapie fonctionnelle". Mais en réalité, de nombreux diabétiques traités avec ces schémas font de l'insulinothérapie fonctionnelle sans le savoir. Ils n'ont pas fait les tests que proposent les médecins et que les paragraphes suivants vont détailler. Mais jour après jour, la nécessité de "vivre avec le diabète" leur permet d'acquérir une connaissance intime et au "feeling" de leur traitement. Celle-ci vaut parfois autant que le stage proposé par les médecins.
Qu'est ce que le schéma basal-bolus ?
Pour mimer le fonctionnement d'un pancréas normal, l'idéal consiste à délivrer une insuline qui couvre les 24 heures et des insulines rapides au moment des repas. L'insuline qui couvre les 24h, insuline dite "basale", a pour objectif de vous donner des glycémies normales en dehors des repas. Les rapides ou "bolus" au moment des repas, vous les adaptez à la quantité de glucides que vous mangez. Elles empêchent ainsi la glycémie de monter après le repas.
Comment déterminer au mieux les besoins de base, comment trouver les doses de lente ?
Pour trouver la dose d'insuline lente qui vous convient, la méthode de référence est la pratique d'un jeûne glucidique de 24 heures en injectant uniquement l'insuline lente, sans les rapides, et en étudiant les glycémies capillaires sur 24 heures. Il est bien évident que cela ne se pratique qu'à l'instigation du médecin et sous son contrôle. Dans la journée de ce test, vous prendrez au petit déjeuner un thé ou café sans sucre, au déjeuner et au dîner de la viande avec une salade et du fromage. Vous ferez l'insuline lente ou basale comme d'habitude si vous avez déjà un schéma "basal-bolus" (sinon, la dose théorique sera de 0,3 à 0,4 unités par kg (votre poids) et par jour : par exemple pour 70 kgs, vous ferez entre 21 et 28 unités d'insuline lente). Les glycémies capillaires seront mesurées toutes les 2 heures dans la journée et toutes les 3 heures pendant la nuit.
La glycémie qu'on veut atteindre durant ces 24 heures de jeûne glucidique est située entre 70 à 140 mg/dl. Si les chiffres sortent de ces valeurs, vous corrigerez votre glycémie à l'aide d'un supplément d'insuline rapide ou d'une ingestion de glucose. En analysant à la fin de ce test la manière dont on aura du corriger vos glycémies pendant ces 24 heures, on pourra déterminer plus précisément votre dose quotidienne d'insuline basale: Une nouvelle journée de jeûne glucidique permettra de tester cette nouvelle dose réévaluée. Ce test vous permet aussi de prendre conscience du fait que vous avez besoin d'insuline lente tous les jours, même si vous ne mangez pas, et donc que, grâce à votre insuline basale, vous pourrez sauter ou retarder un repas sans risquer une hypoglycémie ou rester à jeun si nécessaire. Ce test vous aura permis aussi de comprendre que vos horaires de repas sont donc libres ! C'est quand vous avez décidé de manger que vous intervenez avec une insuline rapide.
Comment déterminer la dose d'insuline rapide en fonction des glucides du repas ?
On peut partir de la base suivante : pour 10 grammes de glucides, il faudra 2 unités d'insuline au petit déjeuner, 1 unité au déjeuner et 1,5 unité au dîner. Vous adapterez ensuite la dose à votre cas grâce à des repas tests (par exemple un petit déjeuner de 40 grammes de glucides, un déjeuner et un diner de 60 ou 80 grammes de glucides). Le jour du "repas test" vous pesez bien les aliments, vous faites votre dose théorique d'insuline rapide avant le repas et vous mesurez votre glycémie une heure et demi après le début du repas. Elle ne doit pas monter de plus de 40 mg/dl : par exemple 100 mg/dl avant le repas ne doit pas être suivi de plus de 140 mg/dl une heure trente après, avec un retour à la glycémie normale 4 heures après la début du repas. Vous allez ainsi déterminer le nombre d'unités d'insuline qu'il vous faut pour 10 grammes de glucides, ce nombre étant différent pour le petit déjeuner, le déjeuner et le dîner. Par la suite, la difficulté est de prévoir ce que vous allez manger et d'évaluer grosso-modo la quantité de glucides en vous aidant au départ de petites tables de poche et d'une balance.
Comment corriger une glycémie trop haute (au dessus de 130 ou 140) ou trop basse (en dessous de 70) ?
En ce qui concerne la glycémie trop haute, il va falloir évaluer l'efficacité d'une unité d'insuline rapide. Habituellement elle fait baisser la glycémie de 30 à 40 mg/dl, mais il faut faire un test lors d'une glycémie stable depuis environ 2 heures, injection d'une unité de rapide et contrôle de la glycémie capillaire toutes les heures pendant 4 heures. Ce test peut être réalisé le jour de l'épreuve de jeûne glucidique. A l'opposé, il faudra tester l'efficacité de 15 grammes de glucides en "re-sucrage" : de combien la glycémie remonte-t-elle 15 minutes après ? En général cela tourne autour de +50 mg/dl. Ainsi, quand votre glycémie est trop haute, vous pourrez faire des corrections, surtout avant les repas, en additionnant cette dose correctrice à la dose d'insuline nécessaire aux glucides de votre repas.
Comment adapter l'insuline en cas d'activité physique ?
On détermine l'adaptation des doses d'insuline grâce à l'étude d'une activité physique intense et brève (moins de 2 heures) puis d'une activité importante et prolongée au delà de deux heures. On peut partir sur la base suivante : en cas d'activité physique intense et brève après le repas, il faut diminuer la dose de rapide de ce repas de 30 à 50 % ; En cas d'activité physique intense et brève en fin d'après-midi, il faut diminuer la dose de rapide du repas du soir de 30 à 50 %. En cas d'activité physique importante et prolongée, il faut diminuer la dose de rapide des repas et la dose de lente (ou diminuer le débit basal de la pompe sous forme d'un débit basal temporaire).
A qui s'adresse l'insulinothérapie fonctionnelle, comment apprendre ?
Tout patient diabétique de type 1 peut avoir recours à cette technique. Il faut déjà avoir un schéma type basal-bolus et de l’expérience. Vous n'êtes pas obligé de réaliser tous ces tests ! Mais, comme pour la pompe à insuline, on doit faire en général plus de contrôles glycémiques. L'avantage de cette méthode, c'est qu'elle permet d'apprendre beaucoup de choses en matière de diététique, ce qui est le point faible de nombreux diabétiques.
Certains patients sont parfaitement équilibrés avec leur schéma basal-bolus, et modifient "au jugé" leur dose d'insuline rapide en fonction du repas, de la glycémie de départ et de l'activité physique qui va suivre : ils font de l'insulinothérapie fonctionnelle à leur manière, sans règle mathématique ! D'ailleurs ce serait une erreur de croire que la gestion du diabète peut se résumer à une calculatrice qui déterminerait la dose d'insuline à faire avant chaque repas et que ces calculs resteraient valable toute la vie! D'autres patients voudront faire ces tests pour affiner la connaissance de leur diabète : c'est à eux que s'adressent les "stages pratiques d'insulinothérapie fonctionnelle" organisés par la plupart des équipes de diabétologie. Ils ont pour but de vous apporter une connaissance supplémentaire pour que vous viviez au mieux votre diabète avec le meilleur équilibre possible. Mais vous devez bien comprendre qu'on ne peut pas soigner le diabète avec des règles mathématiques rigides. Elles seraient de toutes façons vouées à l'échec face à la vie de tous les jours !
http://www.hegp.fr/diabeto/traitementinsulineif.html