Chien-Shiung Wu (1912 – 1997) est une physicienne sino-américaine, spécialiste de physique nucléaire. Au sein de la communauté scientifique, elle a été surnommée notamment « Première Dame de la physique ».
« Valeureux héros »
Fille de Fan Fuhua et de Wu Zhongyi, Chien-Shiung Wu nait le 13 mai 1912 à Shanghai mais c’est à Liuhe, à une cinquantaine de kilomètres de là, qu’elle grandit avec ses deux frères. Ses parents sont ouverts et progressistes, et en particulier son père, défenseur précoce de l’égalité des sexes. Fondateur et enseignant à l’Ecole supérieure professionnelle de femmes de Mingde, il encourage sa fille à faire des études, ce qui est peu courant. Son prénom, signifiant « valeureux héros », témoigne de la confiance de ses parents en ses compétences.
Chien-Shiung fréquente donc l’école de sa ville puis, à onze ans, rejoint l’école normale de jeunes filles de Suzhou, à une centaine de kilomètres de Shanghai. Elle s’y forme à la carrière d’institutrice mais finit par découvrir sa passion pour les sciences. Craignant que ses études ne l’aient pas suffisamment préparée pour l’université, elle envisage d’y renoncer mais son père l’encourage à poursuivre son objectif. Il lui procure des manuels et l’exhorte à préparer d’elle-même les examens d’entrée.
Chien-Shiung suit son conseil ; en 1929, elle intègre l’Université centrale nationale à Nankin. En 1934, elle obtient sa licence en physique. En 1936, Chien-Shiung part poursuivre ses études aux Etats-Unis, à l’Université de Californie à Berkeley. Elle y étudie sous la direction du physicien Ernest Lawrence, lauréat du prix Nobel de physique en 1939. En 1940, après avoir obtenu son doctorat, elle se lance dans l’enseignement.
Le projet Manhattan
En 1942, Chien-Shiung épouse le physicien Luke Chia-Liu Yuan, avec qui elle aura un fils et avec qui elle s’installe sur la côte est. La jeune physicienne enseigne quelques temps au Smith College et à l’université de Princeton – où elle devient la première femme à obtenir le titre de professeure assistante – avant de se fixer à l’université Columbia. Sa vie est désormais bien établie aux Etats-Unis. La Seconde guerre mondiale a éclaté depuis plusieurs années, de même que la guerre sino-japonaise. Les Etats-Unis sont entrés en guerre et Chien-Shiung n’entrevoit pas d’autre possibilité, pour soutenir sa famille et son pays, que de se consacrer à la recherche pour tenter d’aider à la victoire. En 1942, elle fait partie des rares femmes à avoir intégré le projet Manhattan, le projet de recherche ayant produit la bombe atomique. Elle y développe notamment un processus pour séparer les isotopes d’uranium par diffusion gazeuse.
Une spécialiste internationale
Après la guerre, elle concentre ses recherches sur une branche de la physique nucléaire, la désintégration bêta, dont elle devient une spécialiste internationale. Elle travaille aux côtés des physiciens Tsung-Dao Lee et Chen Ning Yang sur les lois de parité et, en 1956, valide leur théorie en démontrant par expérience la non-conservation de la parité dans les interactions faibles. Cette démonstration permet de réfuter une théorie de la physique considérée comme une loi de la nature (affirmant que lors des réactions nucléaires, le mode de dispersion des particules ne suit aucune direction particulière) et ébranle par conséquent le monde de la physique. L’année suivante, Lee et Yang reçoivent le prix Nobel pour leurs travaux ; Chien-Shiung n’est pas mentionnée. Si certains affirment que le caractère expérimental de ses travaux seraient moins importants que les théories de ses collègues, il est plus vraisemblable qu’elle ait été, comme beaucoup d’autres, victime de sexisme.
Largement reconnue par ses pairs, Chien-Shiung reçoit néanmoins de nombreuses récompenses et distinctions. Parmi ces prix, en 1958, elle est élue membre de l’Académie nationale des sciences des Etats-Unis et reçoit le prix de la Research Corporation (anglais) ; en 1960, elle obtient le Prix de la réussite American Association of University Women. En 1965, Chien-Shiung publie un ouvrage sur la désintégration béta (Beta decay) qui reste une référence pour les physiciens nucléaires d’aujourd’hui. En 1975, elle devient la première femme à devenir présidente de la Société américaine de physique. En 1978, elle obtient le tout premier Prix Wolf de physique, remis par la fondation Wolf en Israël et considéré comme l’une des distinctions les plus prestigieuses dans le domaine.
Chien-Shiung Wu meurt le 16 février 1997 à New York à l’âge de 84 ans.
Liens utiles
Chien-Shiung Wu, « Première Dame de la physique »
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Page Wikipédia de Chien-Shiung Wu
https://histoireparlesfemmes.com/2016/11/21/chien-shiung-wu-physicienne-brillante/