Boston, Etats-Unis – Marier l’art et la science, les dernières avancées technologiques et la tradition, le beau et l’utile, c’est en quelque sorte la base du projet Dermal Abyss mis au point par des 4 chercheurs du MIT de Boston en collaboration avec 2 chercheurs de l’Harvard Medical School. Leur idée : mettre au point un – joli – tatouage dont les teintes varient en fonction du taux sanguin de glucose, et pouvoir ainsi évaluer sa glycémie (et d’autres paramètres physiologiques) d’un seul coup d’œil [1]. Leurs travaux viennent d’être présentés à l’International Symposium on Wearable Computers 2017.
La glycémie à fleur de peau
Les tatouages sont à la mode, du moins sous leur forme traditionnelle, à savoir l’insertion dans le derme de pigments permanents non bio-dégradables. Dans un futur plus ou moins proche, le tatouage pourrait devenir informatif en plus d’être décoratif. Mais plutôt qu’une puce placée sous la peau et requérant un lecteur (comme cela se développe pour connaitre la glycémie des patients diabétiques), les chercheurs ont opté, ici, pour une visualisation des données physiologiques à même la peau.
Transformer la peau en un « écran interactif » nécessite de réaliser un tatouage un peu particulier où l'encre traditionnellement injectée sous la peau est remplacée par des microcapteurs biologiques dont la couleur change en fonction du liquide interstitiel avec lequel ils sont en contact. « De la même façon que l’industrie des dispositifs portatifs connectés (wearable computers) s’est rapprochée des entreprises de la mode pour créer des vêtements intelligents, ici les experts en biotechnologies travaillent conjointement avec des spécialistes de la peau, dermatologues, chirurgiens plastique et tatoueurs pour développer ces dispositifs d’un nouveau genre » expliquent les chercheurs dans une vidéo sur leurs travaux.
Dans ce cas précis, quatre types de capteurs dont la couleur varie dans différentes tonalités sont à l’étude : l’un sensible au pH, un autre au taux de glucose, un troisième au sodium. Le dernier capteur réagit, lui aussi, aux variations de pH mais fluoresce sous lampe UV.
Réactions enthousiastes
Avoir un accès permanent et direct, sous une forme visuelle et artistique, à ses différents fluides corporels comme reflet immédiat des processus métaboliques internes est, bien sûr, extrêmement attrayant. Avec des applications médicales assez évidentes en termes de surveillance en continu pour les patients qui le nécessitent comme les diabétiques. Pour eux, se piquer quotidiennement à plusieurs reprises deviendrait caduque avec ce type de système puisqu’il leur suffirait alors de regarder vers quelles tonalités évolue le tatouage pour adapter leur traitement. La médiatisation du projet a d’ailleurs suscité des réactions enthousiastes de patients diabétiques qui ont contacté les chercheurs par e-mail en disant « Je veux l’essayer », a témoigné Xin Liu, l’une des responsables du projet au MIT, auprès de CBS News [2].
Mais pas de commercialisation prévue dans l’immédiat
Pour autant, si l’équipe de DermalAbyss a fait la preuve que ce concept d’interface biologique fonctionne, il s’agit toujours, à ce stade, d’un projet de recherche – mené ex vivo sur la peau de cochon – et il n’est pas prévu d’essais cliniques, et donc encore moins de commercialiser le produit dans l’immédiat. D’autant que subsiste un certain nombre de limites, comme le rappellent les chercheurs sur leur site, par exemple :
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Etendre l’éventail de couleurs et d’intensité des capteurs actuels pour permettre de lire l’information avec une meilleure résolution.
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Etablir le profil de sécurité de ces capteurs, avec des tests de toxicité et de biocompatibilité in vitro, avant de passer à des études in vivo chez l’animal.
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Appréhender la façon dont les capteurs diffusent dans les tissus via des recherches in vivo sur le long terme. Une direction de recherche possible serait de conjuguer capteurs biologiques et microsphères en polymère pour prévenir une éventuelle diffusion dans les tissus, précisent-ils.
« Il va se passer du temps avant que quoi que ce soit de concret arrive sur le marché, mais cela [cette technologie] stimule l’imagination et ouvre le champ des possibles » conclut joliment Xin Liu dans son interview à CBSNews [2].
Le tatouage qui informe de la glycémie : une idée dans l’air du temps
Comment éviter que les patients diabétiques ne soient obligés de se piquer plusieurs fois par jour pour connaitre leur glycémie ? Depuis une dizaine d’années, les chercheurs rivalisent d’imagination pour trouver des solutions et l’idée du « tatouage » qui permettrait de rendre visible à la surface de la peau le taux du glucose a effleuré de nombreux esprits et conduit à différentes tentatives.
Ainsi, en 2010, des chercheurs du MIT travaillaient sur un projet de nanoparticules de carbone sensible à la concentration en glucose et qui fluorescent dans des longueurs proches de l’infrarouge [3]. Leur idée était de créer une solution de nanoparticules, que l’on injecterait à la manière d’une encre et formant un tatouage (temporaire) mais nécessitant un lecteur d’infra-rouges pour l’analyse.
En 2015, des chercheurs de l’Université de San Diego ont publié dans Analytical Chemistry un article assurant qu’ils avaient fait la preuve du concept d’un autre type de « tatouage » temporaire, un dispositif flexible temporaire composé d'électrodes imprimées. Une fois appliqué sur la peau, ce tatouage produit pendant 10 minutes un courant électrique très léger afin de forcer les ions sodium présents dans le sang entre les cellules de la peau à migrer vers les électrodes (iontophorèse inverse) [4]. Ces ions transportent avec eux des molécules de glucose. Un capteur incorporé dans le tatouage mesure l’intensité de la charge électrique produite par le glucose, ce qui permet de déterminer le taux de glucose dans le sang du porteur. « La concentration en glucose qui est détectée est près de 100 fois inférieure à celle dans le sang, ce qui suppose de développer des capteurs avec une forte sensibilité et une grande sélectivité » explique l’un des chercheurs.
Il y a fort à parier que le concept de tatouage, quelle que soit la forme qu’il prendra, gagne du terrain à l’avenir.
Crédit photos : DermalAbyss
https://francais.medscape.com/voirarticle/3603622#vp_2
malin ! à la place d'un bâtonnet---- le bâtonnet est sur la peau-
un beau progrès ! bravo !
bonne fin de journée-