Grâce à son alliance avec Sanofi, Google et sa filiale santé continuent leur long engagement pour lutter contre les diabètes.
Google s'acharne contre le diabète. Lundi, le géant américain a annoncé un partenariat avec Sanofi pour renforcer la lutte contre cette maladie chronique dans son viseur depuis plusieurs années. Ce mariage vise à "améliorer la prise en charge et les résultats cliniques des personnes atteintes de diabète de type 1 et de type 2", précise l'entreprise pharmaceutique. Depuis un peu plus d'un an - avant même la création formelle de Google Life Sciences, filiale santé du groupe Alphabet -, les annonces de partenariats se multiplient dans le combat contre cette maladie.
Novartis, Dexcom et Sanofi
En juillet 2014, Novartis, principal concurrent de Sanofi, dévoilait déjà une alliance de Google avec sa filiale Alcon, spécialisée dans les produits ophtalmologiques. Le but: développer une "lentille connectée", annoncée en 2012, qui doit notamment permettre de mesurer instantanément le taux de glycémie grâce à un micro-capteur intégré.
En août 2015, deux jours seulement après la réorganisation massive de Google dans le groupe Alphabet, c'était au tour de DexCom, groupe spécialisé dans les systèmes de surveillance du diabète, de s'allier au géant californien. La firme et son nouvel acolyte entendent miniaturiser un outil de contrôle de la glycémie.
Dernier épisode en date, donc, l'alliance avec Sanofi. Les deux entreprises veulent trouver des "moyens d'améliorer la prise en charge du diabète en développant de nouveaux outils qui rassemblent un grand nombre d'aspects, auparavant cloisonnés". Cela inclut notamment "les indicateurs de santé tels que la glycémie sanguine et les niveaux d'hémoglobine A1c, les informations rapportées par les patients, les régimes médicamenteux et les dispositifs de détection", continue le groupe pharmaceutique. Andrew Conrad, dirigeant de Google Life Sciences, parle d'"établir une plate-forme pour coordonner nos efforts dans la lutte contre le diabète", dit-il dans Les Echos.
Des centaines de millions de malades impatients
Google se donne donc les moyens de s'engouffrer dans ce filon potentiellement juteux. Andrew Conrad concède d'ailleurs dans son interview "répondre à une logique économique". Et pour cause: pour 9 dollars dépensés dans le monde en soin de santé, 1 dollar l'est pour lutter contre le diabète ou ses conséquences. En 2014, en France, l'International Diabetes Foundation estimait que chaque diabétique coûtait un peu moins de 5 000 euros par an. Les près de 400 millions de malades dans le monde sont donc autant de clients possibles. Selon Erik Hunecker, dirigeant de la start-up Diabeloop qui développe un pancréas artificiel, "des malades sont prêts à payer", pour améliorer leurs conditions de vie, "même si ce n'est pas remboursé".
Or, il reste beaucoup à faire dans ce domaine. Selon plusieurs spécialistes du secteur, l'industrie pharmaceutique a mis du temps à se lancer dans les nouvelles technologies au service de la santé. Sanofi, qui se targue d'être précurseur, a lancé un des premiers lecteurs de glycémie connecté à un iPhone en 2013. Selon Guillaume Charpentier, président du CERIDT et diabétologue à l'hôpital de Corbeil-Essonnes, le secteur tout entier a mis du temps à voir le profit à faire dans les innovations. Google, qui lorgnait sur le marché mais craignait de s'engager seul dans un marché très réglementé, peut désormais s'appuyer sur des géants rodés, comme Sanofi ou Novartis. Et rattraper ce qu'Erik Huneker estime être "le retard technologique des acteurs actuels" du milieu du diabète - un secteur pourtant "en pointe" comparé à d'autres, selon Guillaume Charpentier.
Le diabète, cible "parfaite" pour Google
Avec un nombre de malades toujours croissant dans un secteur, l'obsession de Google pour le diabète n'étonne pas les spécialistes du secteur. L'affection touche son coeur de métier. Le dirigeant de start-up Erik Huneker rappelle que "Google est bon dans la technologie de pointe, dirigée vers les masses", comme celle utilisée pour les lecteurs de glycémie les plus innovants.
L'autre atout des équipes de la firme californienne, selon l'entrepreneur, réside dans le big data, la gestion de données de masses au centre du travail de Google. Contrairement aux maladies cardio-vasculaires, première cause de mortalité dans le monde selon l'Organisation mondiale de la santé, le suivi des patients diabétiques peut s'avérer drastique. Beaucoup de diabétiques doivent effectuer des analyses sanguines au moins trois fois par jour, rappelle Jean-Hugues Masgnaux, directeur du Centre d'études et de recherches pour l'intensification du traitement du diabète (CERITD). Dans la lutte contre cette maladie, "il faut une approche plus individuelle, pas statistique et moyenne", plaide dans Les Echos Andrew Conrad. Quand le patient doit autant s'impliquer dans sa guérison, les smartphones et autres outils connectés sont une aubaine pour lui donner de meilleures indications sur son taux de glycémie. Google (avec ses partenariats) devient alors le parfait candidat pour leur simplifier la vie.
Google Life Science peut aussi compter sur "la mentalité de la Silicon Valley", comme la décrit Erik Huneker, qui a lui-même vécu dans la baie de San Francisco. "Son mot d'ordre : 'bet big' [parier gros, en anglais]. Ne pas avoir peur de s'engouffrer dans un domaine intéressant, stimulant, sans être certain de gagner de l'argent". Car Google, en plus de la lutte contre le diabète, lâche également des millions pour s'attaquer au cancer, aux maladies neurologiques ... Et caresse même le doux rêve d'empêcher la mort.
http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/pourquoi-le-diabete-est-devenu-une-marotte-chez-google_1711567.html