Au lendemain de la diffusion du magazine de Zone interdite intitulé "Droit de Mourir : l’enquête qui dérange", un sondage conduit par Harris Interactive pour la chaîne de télévision dévoile ce que les Français savent de la fin de vie et de son encadrement légal : Ont-ils entendu parler de la loi Leonetti ? Ont-ils réfléchi à ce qu’il se passerait si eux-mêmes ou l’un de leurs proches était concerné ? Découvrez les principaux résultats.
Après un énième rapport, la loi Leonetti devrait évoluer en 2015.
Le contenu de la loi Leonetti reste méconnu
Plus de sept Français sur dix (73 %) indiquent avoir entendu parler de la loi Leonetti sur la fin de vie mais seuls 32 % déclarent voir précisément ce dont il s’agit. Les seniors se montrent davantage sensibilisés à cette législation, sa notoriété atteignant 81 % parmi les personnes âgées de 50 à 64 ans et 86 % parmi celles âgées de 65 ans et plus. Les catholiques pratiquants réguliers (85 %) et les sympathisants de Droite (85 %) indiquent également plus souvent en avoir entendu parler, ainsi que les catégories qui se déclarent généralement plus informées que la moyenne comme les hommes (78 %), les catégories supérieures (81 %) et les Franciliens (78 %).
Concrètement, la loi Leonetti a pour but d’éviter les situations d’acharnement thérapeutique (elle parle d’obstination déraisonnable) pour les malades en fin de vie. Elle permet au patient de demander, dans un cadre défini (impliquant notamment une concertation des professionnels) l’arrêt d’un traitement médical trop lourd. En cas d’impossibilité de recueillir l’avis du patient, sa volonté peut être rapportée par des directives anticipées ou le recours à une personne de confiance. Cette loi vise également à développer les soins palliatifs.
Les directives anticipées restent rares
69% des Français déclarent avoir réfléchi à ce qu’ils souhaiteraient que l’on fasse s’ils se retrouvaient dans un état de coma ou d’inconscience prolongé et que les médecins avaient la certitude que leur état ne pourrait évoluer. Mais moins de trois sur dix (28 %) affirment avoir fait des démarches pour faire connaitre leur volonté, que cela soit par exemple en en parlant avec leurs proches ou en l’écrivant. Sur cette dimension, on note à nouveau une différence en termes d’âge puisque les plus âgés indiquent plus souvent avoir réfléchi à la question (73 % parmi les 65 ans et plus), sans pour autant entamer davantage de démarches pour faire connaitre leur volonté (seulement 25 %, soit un peu moins que la moyenne des Français).
En février 2013, le Conseil nationale de l’ordre des médecins (CNOM) souhaitait mieux informer le grand public des dispositions de loi concernant les directives anticipées et la désignation d'une personne de confiance. Il suggérait que les premières soient répertoriées dans un registre national ou sur un support accessible aux soignants.
Les Français largement ouverts à l’euthanasie en cas d’état végétatif sans espoir
Si la situation devait se présenter pour l’un de leurs proches, les Français estiment tout aussi majoritairement (78 %) qu’ils demanderaient plutôt l’arrêt des soins, et plus particulièrement parmi les seniors (81 % des personnes âgées de 50 ans et plus), les personnes vivant en zone rurale (83 %) et celles se déclarant proches du Parti socialiste (86 %).
Publié par l’ADMD, une association pro-euthanasie ADMD, un autre sondage avançait en octobre la proportion des Français favorables à l'euthanasie pour des personnes souffrant de "maladies insupportables et incurables" atteignait même 96 %.
Des missions, des rapports, des promesses…
Une nouvelle loi sur la fin de vie figurait parmi les promesses de campagne de François Hollande (engagement 21). Mais depuis, les missions et les rapports se multiplient sans réelle avancée. En juillet 2012, le Président confie une mission au Pr. Sicard pour réfléchir sur la question de la "fin de vie". Le rapport remis en décembre ébauche la dépénalisation d'une assistance au suicide sans pour autant la recommander, mais réitère son opposition à la légalisation de l'euthanasie. Le président saisit le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) qui rend son avis en juillet 2013, qui recommande de ne pas modifier la loi actuelle concernant la fin de vie et rejette à la majorité toute idée de dépénalisation du suicide assisté ou de l'euthanasie. Le CCNE considère néanmoins que "la réflexion sur le sujet de la fin de vie n'est pas close et qu'elle doit se poursuivre sous la forme d'un débat public", conformément à ce que prévoit la loi relative à la bioéthique. Ce sera finalement une conférence de citoyens sur la fin de vie réunissant 18 citoyens représentatifs qui rendra ses conclusions en décembre 2013. Parmi ses recommandations figure la légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie en cas de "pathologie irréversible, (et) reposant avant tout sur son consentement éclairé et sa pleine conscience", le refus de l’inscription de l’euthanasie dans la loi française au-delà de la loi Leonetti (sauf cas exceptionnel) et le renforcement de la formation du personnel médical et soignant dans le domaine de la fin de vie. Enfin, suite à deux affaires médiatisée (affaires Bonnemaison et Lambert), une mission est confiée aux députés Jean Leonetti (UMP) et Alain Claeys (PS) pour faire évoluer la loi Leonetti. Les deux hommes doivent soumettre leurs propositions avant le 1er décembre. En octobre dernier, le CCNE rend sa synthèse de deux années de débat public sur la fin de vie après avoir consulter de nombreuses institutions (Ordre des médecins, Académie nationale de médecine, Observatoire national de la fin de vie), ainsi que des citoyens. Selon un rapport du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), les Français seraient favorables à un "droit à la sédation profonde" et au recours aux soins palliatifs en amont de la fin de vie.
La loi pourrait intervenir au début 2015…
Au-delà des missions et des déclarations rythmées par l’actualité médiatique, il est temps de reprendre les termes d'un débat apaisé et d’engager des actions politiques concrètes, dont certaines font déjà l’objet d’un assez large consensus : développement et renforcement des soins palliatifs, généralisation du recours aux directives anticipées… Fin octobre, le chef de file des députés radicaux de gauche Roger-Gérard Schwartzenberg aurait assuré que le Président de la République lui aurait promis le dépôt au Parlement d'un texte de loi sur la fin de vie "autour du mois de mars", avec un dépôt du texte dans la foulée de la remise du rapport de Jean Leonetti et Alain Claeys. Affaire à suivre…
David Bême
Source :
Enquête de l’institut Harris réalisée en ligne du 12 au 14 novembre 2014. Echantillon de 1 497 personnes, représentatif des Français âgés d’au moins 18 ans. Méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région de l’interviewé(e).
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