Le diabète n'est pas un long fleuve tranquille. Le blog de A.B.D - Le groupe des Personnes Diabétiques de Bruxelles hébergé Eklablog
On dit souvent que le premier ennemi que l'on a à combattre est à l'intérieur de soi. A l'âge de six ans, Quentin Valognes s'est découvert son principal adversaire : le diabète de type 1. Une maladie qui peut pourrir la vie quand on n'est pas décidé à se battre, qui peut empêcher que les rêves se réalisent si on n'y croit pas fortement. Pendant de nombreuses années, ce coureur prometteur a pensé que cet ennemi, que représente le diabète, était la seule chose à combattre dans sa vie. Débarqué au sein de l'équipe américaine du Team Novo Nordisk (composée uniquement de coureurs atteints d'un diabète type 1), ce jeune Normand de 19 ans a compris que ce n'était pas contre, mais avec sa maladie, qu'il devrait lutter pour faire en sorte que ses rêves deviennent réalité.
"Quand j'étais petit j'avais un rêve : faire le tour du monde, découvrir tous les pays de la planète, et être coureur cycliste professionnel". Quentin Valognes a 19 ans. Un âge où l'on a encore des rêves plein la tête, mais où l'on commence à prendre conscience de la dureté de la vie et de cette recherche si difficile du bonheur. Il n'a pas encore la vingtaine que ce robuste normand a déjà (presque) tout connu : le malheur d'apprendre à l'âge de six ans qu'il est atteint d'un diabète type 1. L'envie de s'en sortir et d'en finir avec cette tourmente quotidienne. La rage de vaincre, le goût de l'effort, de se dépasser sur le vélo. Le choix de quitter sa famille et la France pour traverser l'Atlantique. Direction Atlanta, et le Team Novo Nordisk. Une structure américaine où l'on trouve trois équipes : une réservée aux juniors, une formation-réserve, et enfin celle des professionnels.
D'entrée de jeu, Quentin Valognes se fait remarquer sous ses nouvelles couleurs, en empochant plusieurs étapes au Tour de l'Abitibi, manche de la Coupe du monde juniors. Le Normand, présent sur la course en qualité de coursier de l'équipe du coin, fait parler sa force et son art du sprint en y levant plusieurs fois les bras au nez et à la barbe des meilleurs juniors du monde. Depuis, « l'Amérouquin », comme ses meilleurs amis le surnomment, vit un rêve éveillé.
D'ennemi, son « diab » (c'est ainsi qu'il l'appelle) est devenu un ami. Une raison de se battre, un argument de plus pour réussir : "Quand j'étais plus jeune, j'ai fait cette erreur que de penser que mon combat, je le menais contre mon diabète. Depuis que je suis au Team, j'ai compris que mon combat se fait AVEC le diabète." Ne lui parlez jamais d'abandon, cet ancien membre du Pôle espoirs de Caen ne connaît pas ce terme et est bien décidé à ne jamais l'appliquer. "Quand je me sens moins bien, je n'ai pas le choix, je dois faire avec et je ne peux pas dire stop. Cette mentalité, je l'adopte également sur le vélo, où je me bats à chaque fois jusqu'au bout. J'en bave, mais je me dois de finir ce que j'ai commencé. Je n'arrête jamais, je me l'interdis".
C'est sous la tutelle du Team Novo Nordisk que Quentin Valognes s'épanouit désormais. Grâce à cette équipe créée en 2012, le jeune homme progresse sur tous les points : "j'ai d'abord découvert qu'il n'y a pas qu'en Europe qu'on sait faire du vélo. Chaque pays a sa spécificité, comme par exemple les coureurs américains, qui sont adeptes des étirements. Ici j'apprends également à mieux gérer mon diabète. Et humainement parlant, c'est très riche. Je vis dans une grande maison à Atlanta, où nous sommes 17 coureurs à cohabiter, avec 14 nationalités différentes. C'est comme une seconde famille." A 19 ans, le jeune Normand parle français, anglais et russe (il réapprend en ce moment l'allemand) et a déjà découvert quinze pays. Il est actuellement en train d'écrire son livre, dans lequel il raconte à cœur ouvert ses aventures. Ses projets, ses ambitions, mais aussi sa vie de sportif de haut-niveau avec une maladie aussi difficile à vivre qu'est le diabète de type 1. "Diab, ami pour la vie" est le titre de ce nouveau projet qu'écrit actuellement ce talentueux sprinteur, où il fait intervenir sa famille cycliste, et ses amis les plus proches.
Le pistard normand force l'admiration, et rend fier ses meilleurs amis, coureurs eux-aussi, qui ont pu le côtoyer ces dernières années. Marc Fournier évoluera l'an prochain sous les couleurs professionnelles de la FDJ. Il se montre très impressionné par les performances de son ami : "Il a réussi à faire de sa maladie sa force dans la vie de tous les jours, que ce soit sur le vélo ou en dehors. Je ne sais pas si j'aurais été capable de faire un dixième de ce qu'il fait. J'ai énormément de respect pour lui." Benoît Cosnefroy, membre de l'équipe de France espoirs, est lui aussi admiratif de son "Amérouquin" : "Je trouve qu'il fait un parcours extraordinaire. Ce n'était pas gagné car sa maladie lui a posé quelques soucis à ses débuts, quand par exemple les médecins lui disaient que le sport de haut de haut niveau était difficilement compatible avec le diabète. C'était difficile à entendre, mais ça l'a rendu plus fort, et il a tenu à prouver que c'était bien plus que compatible. Je suis fier de son parcours, qu'il ne change rien."
Quentin Valognes est amené à grandir. Le talent est là, planté dans ses puissantes jambes. Les heures de travail et les sacrifices sont nombreux, et ça paie. Ce Caennais est pour l'instant dans l'équipe réserve du Team Novo Nordisk. Il ambitionne de passer chez les pros quand son heure sera venue. Mais pour le jeune homme, ce passage serait bien plus qu'un objectif sportif réussi : "Je souhaite inspirer les gens autant qu'on a pu m'inspirer moi. Leur donner une chance autant qu'on a pu m'en donner. Le but du Team Novo Nordisk, c'est d'éduquer et d'inspirer les jeunes diabétiques, comme j'ai pu l'être. On veut montrer qu'on a deux bras, deux jambes comme tout le monde. Nous aussi nous avons le droit d'avoir des rêves et pour les réussir il faut s'en donner les moyens."
Le Team Novo Nordisk ambitionne de participer au Tour de France en 2021, date du centième anniversaire de la découverte de l'insuline. Tout un symbole pour une équipe qui ne cesse de prouver que les rêves sont à portée de tous. Qu'il suffit pour cela de bien s'entourer et de reconsidérer ceux que l'on considère comme des ennemis. Un adversaire qui, comme pour Quentin, peut s'avérer devenir « un ami pour la vie ».
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