Le diabète n'est pas un long fleuve tranquille. Le blog de A.B.D - Le groupe des Personnes Diabétiques de Bruxelles hébergé Eklablog
L'adaptation correctrice des doses d'insuline
L'adaptation correctrice est une méthode complémentaire de l'adaptation prévisionnelle des doses d'insuline.
Principe
Elle consiste à modifier la dose d'insuline que l'on va s'injecter pour corriger la glycémie que l'on vient de faire.
C'est probablement la méthode qui vient à l'esprit le plus spontanément.
En effet, quoi de plus logique, en apparence, que de se dire «Je constate que ma glycémie est élevée, alors je vais m'injecter une dose d'insuline un peu plus forte afin de faire baisser cette
glycémie» ou encore «Je constate que ma glycémie est basse, alors je vais m'injecter une dose d'insuline plus faible afin de ne pas risquer une hypoglycémie».
Malheureusement, ce raisonnement n'est pas applicable sans de sérieuses restrictions :
• Premièrement, c'est oublier que l'insuline n'est normalement pas une hormone hypoglycémiante, mais une hormone
antihyperglycémiante. En effet, l'insuline n'est jamais fabriquée par un pancréas pour faire baisser une glycémie élevée, mais elle est fabriquée de manière préventive de façon à éviter que
la glycémie ne s'élève.
• Deuxièmement, une adaptation des doses qui serait uniquement basée sur le principe de ramener à la normale des glycémies élevées, conduirait au final à un temps très important passé en
hyperglycémie nocive pour les artères (on a toujours un temps de retard avec ce type d'adaptation).
• Troisièmement, si ce type d'adaptation était appliqué à l'insuline retard, cela ne permettrait pas d'obtenir des glycémies satisfaisantes. En effet, réfléchissons un peu :
- si la glycémie à jeun est élevée et que l'on augmente la dose d'insuline retard du matin, la glycémie avant dîner sera plus basse, et alors de deux choses l'une :
. soit on baissera la dose d'insuline retard du soir pour ne pas risquer une hypoglycémie nocturne, ce qui conduira à une glycémie à jeun encore plus élevée,
. soit on ne baissera pas la dose d'insuline retard du soir, et il y aura alors toutes chances de se retrouver dans la même situation que la veille avec une glycémie à jeun toujours élevée,
- si la glycémie avant dîner est élevée et que l'on augmente la dose d'insuline retard du soir, la glycémie à jeun du lendemain matin sera plus basse, et alors de deux choses l'une :
. soit on baissera la dose d'insuline retard du matin pour ne pas risquer une hypoglycémie, ce qui conduira à une glycémie avant dîner encore plus élevée,
. soit on ne baissera pas la dose d'insuline retard du matin, et il y aura alors toutes chances de se retrouver dans la même situation que la veille avec une glycémie avant dîner toujours
élevée.
L'adaptation correctrice nécessite donc des conditions précises d'utilisation :
• Elle ne doit concerner que l'insuline rapide, afin de ne pas entraîner de répercussions tardives.
• Elle ne doit jamais être utilisée seule, mais toujours en complément des adaptations prévisionnelle et anticipatrice, lorsque celles-ci n'ont pas permis d'obtenir le résultat
glycémique souhaité (elle n'est en effet qu'une possibilité de correction a posteriori d'une hyperglycémie que l'on n'a pas pu éviter).
Carnet d'autocontrôle
Comme l'adaptation correctrice est une adaptation «en dernier recours» qui a toujours «un temps de retard par rapport à ce qu'il aurait fallu faire», il est souhaitable, lorsqu'on a réalisé une
adaptation correctrice, de répondre à la question suivante : l'adaptation correctrice que j'ai réalisée aujourd'hui aurait-elle pu être évitée par une adaptation prévisionnelle ou
anticipatrice ? ce qui aurait eu l'avantage de ne pas me faire passer une partie de la journée en hyperglycémie avant que je réalise
l'adaptation correctrice.
Autrement dit, l'adaptation correctrice est une «bonne chose» sur le moment, mais il faut également tirer profit des informations qu'elle apporte :
• si l'adaptation correctrice a été nécessaire par suite d'une adaptation prévisionnelle qui n'a pas été faite, il faut que je fasse cette adaptation prévisionnelle dès le lendemain,
• si l'adaptation correctrice a été nécessaire par suite d'une adaptation anticipatrice qui n'a pas été faite, il faut que je réalise cette adaptation anticipatrice la prochaine fois que je me
retrouverai dans une situation identique.
Les adaptations correctrices sont donc à faire quand il le faut, mais l'idéal serait d'avoir à en réaliser le moins souvent possible par suite d'une adaptation prévisionnelle et anticipatrice
bien conduite.
Exemples d'adaptations correctrices :
• Ma glycémie avant dîner est à 1,95 g/l, ce qui n'est pas étonnant étant donné la petite fête qui a eu lieu au bureau vers 17 h à l'occasion du départ à la retraite d'un collègue. Pour
l'insuline retard du soir, l'adaptation prévisionnelle m'indique que je dois m'injecter 2 unités de moins que la veille. C'est donc ce que je vais faire (adaptation prévisionnelle), mais comme je
souhaite que ma glycémie avant le coucher soit normale, je m'injecte en plus un supplément de 4 unités d'insuline rapide (adaptation correctrice). Par ailleurs, pour éviter de me retrouver dans
cette situation, je ferai bien de m'injecter un peu d'insuline rapide lorsque je mange en dehors des repas (adaptation anticipatrice).
• Ma glycémie avant le déjeuner est à 1,48 g/l sans explication plausible, et ce n'est pas une hyperglycémie réactionnelle à une hypoglycémie dans la matinée. Pour l'insuline rapide de midi,
l'adaptation prévisionnelle m'indique que je dois m'injecter la même dose que la veille, mais comme la glycémie avant midi est élevée, je majore la dose d'insuline rapide de 2 unités avant le
déjeuner.
• Ma glycémie à jeun est à 1,52 g/l sans explication plausible, et ce n'est pas une hyperglycémie réactionnelle à une hypoglycémie nocturne. Pour l'insuline rapide du matin, l'adaptation
prévisionnelle m'indique que je dois m'injecter 2 unités de moins que la veille car j'avais fait une hypoglycémie la veille dans la matinée. Je vais donc en fait m'injecter la même dose que la
veille, ce qui permettra de corriger cette hyperglycémie.
Vous avez peut-être remarqué qu'il n'a pas été fait mention dans ces exemples de la possibilité de baisser la dose d'insuline rapide pour réaliser une adaptation correctrice, alors que cette
possibilité avait été détaillée pour les adaptations prévisionnelle et anticipatrice.
C'est en effet rare qu'il soit utile de baisser une dose d'insuline rapide avant un repas en raison de la glycémie faite avant ce repas.
Ce peut être le cas si une activité physique importante et inopinée a eu lieu avant le repas, et a conduit à un malaise hypoglycémique sévère juste avant le repas. Par contre, si la glycémie
avant le repas est simplement un peu basse, sans symptômes, et qu'il n'y a pas eu de cause d'hypoglycémie dans les heures précédentes, il n'est habituellement pas souhaitable de baisser la dose
d'insuline rapide prévue pour le repas. Ceci pour les raisons suivantes :
• Si c'est l'heure d'une injection d'insuline rapide avant un repas, l'insuline que l'on va s'injecter est à une dose qui est prévue pour «s'occuper du repas», c'est-à-dire qu'elle a pour rôle de
permettre une montée de glycémie ne dépassant pas 0,50 à 0,60 g/l en plus de ce qu'elle était avant le repas. Par conséquent, si le repas est pris comme normalement, la glycémie va de toute façon
avoir tendance à monter même si on s'injecte la dose prévue d'insuline rapide.
• Si par contre, on baisse la dose d'insuline rapide avant le repas par crainte d'une hypoglycémie bien que l'on va manger, le résultat sera une hyperglycémie après le repas.
Le plus simple est donc :
• d'avaler un peu de glucides pris sur le repas (une tranche de pain par exemple),
• de déterminer la dose à injecter par l'adaptation prévisionnelle ou anticipatrice (indépendamment du niveau de glycémie avant le repas),
• et de se faire l'injection d'insuline rapide juste avant le repas au lieu d'attendre, comme il se doit, un certain temps entre l'injection et le début du repas (si on utilise un analogue rapide et si on a quelques craintes, on peut exceptionnellement déplacer, à la fin du repas, la dose prévue).
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