Les douleurs lombaires qui irradient dans la jambe trahissent souvent la présence d'une hernie discale, à savoir la saillie d'un disque intervertébral. "Il s'agit de la structure située entre deux vertèbres qui fait office d'amortisseur", précise le Dr Thomas Daenekindt, neurochirurgien au Ziekenhuis Oost-Limburg à Genk et au Mariaziekenhuis Noord-Limburg à Overpelt. "Chacun de ces disques se compose d'un noyau mou entouré d'un anneau solide, qui peut quelquefois se déchirer suite à un faux mouvement, une surcharge ou une usure progressive. Certaines positions ou gestes peuvent alors devenir douloureux. On ne parlera toutefois d'hernie discale que lorsque l'anneau déchiré laisse échapper une partie du noyau pulpeux ; cette masse saillante peut comprimer un ou plusieurs nerfs et provoquer des maux de dos mais aussi une série d'autres symptômes. Si le problème se borne à une douleur irradiant vers la jambe, nous laisserons six semaines à deux mois à l'approche non chirurgicale pour faire son effet. En cas de perte de force musculaire dans une jambe, nous n'attendrons par contre que quelques semaines au maximum... Par contre, si la personne ne peut plus se tenir sur les chevilles ou souffre de troubles de la continence avec perte de sensibilité dans la région génitale, l'opération devra être réalisée le plus rapidement possible."
Sans bistouri
Environ 85 % des hernies peuvent néanmoins être soignées sans recours à la chirurgie : une mise au repos relative et un traitement médicamenteux suffiront alors à faire disparaître la douleur et à résorber quelque peu la saillie. "Cette mise au repos relative signifie que le patient peut continuer à bouger normalement, mais en s'abstenant de tout effort physique important ; il évitera en particulier de soulever ou traîner de lourdes charges, clarifie le Dr Daenekindt. À côté de cela, nous prescrivons également des antalgiques, myorelaxants et anti-inflammatoires. On suspecte en effet que le disque qui fait saillie provoque non seulement une pression mécanique au niveau d'un nerf, mais aussi une inflammation locale."
Mais que faire si la douleur persiste ? "On pourra alors envisager une infiltration transforaminale, à savoir l'injection péridurale d'antalgiques et d'anti-inflammatoires autour du nerf irrité."
Dès que la douleur est à peu près sous contrôle, de nombreux patients débutent également une kinésithérapie. "Ils apprennent ainsi des techniques pour soulever des charges sans malmener leur dos et des exercices musculaires qui stabiliseront leur colonne vertébrale, explique le Dr Daenekindt.
Microscope ou endoscope ?
Si une opération s'avère malgré tout nécessaire, le médecin proposera généralement une microdiscectomie, une technique dont l'efficacité et la sécurité ont été démontrées de longue date et qui reste à ce jour l'étalon-or pour le traitement chirurgical des hernies lombaires. "Elle consiste à réaliser une petite incision de 2 à 4 cm au niveau de la ligne médiane du dos avant de détacher les muscles et d'insérer un microscope 30 à 40 cm au-dessus de cette ouverture, explique le médecin. Grâce à de tout petits instruments et à des foreuses adaptées, nous pourrons ainsi dégager le nerf et retirer l'hernie sous l'oeil du microscope."
Il existe toutefois aussi une alternative, une nouvelle technique opératoire que le Dr Daenekindt et son collègue, l'orthopédiste Peter Vorlat (Mariaziekenhuis), pratiquent en routine depuis janvier 2014. "Elle consiste à réaliser sur ou à côté de la ligne médiane du dos une minuscule incision de 8 mm, qui nous permettra d'introduire une succession de tuyaux creux de diamètre croissant en direction de l'hernie. Ceci permet de séparer les fibres musculaires sans devoir les détacher ou les couper. À travers le dernier tuyau (d'un diamètre de 8 mm) sera introduit l'endoscope, une longue caméra dotée d'une source lumineuse dont les images agrandies s'afficheront sur un écran de télévision. Il possède également un canal permettant le passage de longs instruments tout fins qui serviront à retirer la hernie, tandis qu'un second canal destiné au transport de l'eau irriguera la zone opérée en continu afin de prévenir l'adhésion tissulaire et la formation ultérieure de tissu cicatriciel."
Pas pour tout le monde
Cette technique innovante ne nécessite donc qu'une incision (encore) plus petite et évite de trancher des fibres musculaires. "Le risque de saignements et d'infections postopératoires est sensiblement plus faible, mais le bénéfice le plus marqué se situe au niveau de la revalidation, commente le Dr Daenekindt. En général, le patient sera en mesure de bouger sans douleur quelques heures à peine après l'opération, soit bien plus rapidement qu'après l'intervention classique."
Mais cette technique comporte aussi des limites. "À l'heure actuelle, il n'est pas encore possible d'opérer toutes les hernies discales par endoscopie. Leur localisation et leur nature seront déterminantes. Une hernie qui file vers le haut ou vers le bas de la colonne vertébrale ne sera par exemple pas toujours bien accessible à l'endoscope, et nous préférons également utiliser la microdiscectomie classique dans les hernies plus anciennes et calcifiées ou en présence d'une arthrose importante. La nouvelle technique s'adresse donc surtout à des jeunes gens victimes d'une hernie lombaire aiguë."
Et le prix ?
Une petite comparaison du prix pour conclure ? "Le patient déboursera la même somme pour les deux interventions. Pour l'hôpital, la technique endoscopique reste légèrement plus chère lorsqu'il est nécessaire d'utiliser des instruments qui n'existent que sous forme jetable... mais ce n'est que temporaire, car des alternatives réutilisables sont actuellement en développement."
Certaines études laissent entendre que les hernies éliminées par endoscopie tendraient à réapparaître plus facilement que les cas opérés par la voie classique, mais des recherches plus récentes semblent contredire cette observation. "Il faudra donc encore tirer ce point au clair, poursuit le Dr Daenekindt. En comparaison avec l'intervention classique, l'endoscopie génère par contre beaucoup moins de tissu cicatriciel, ce qui signifie également que s'il devait être nécessaire d'éliminer une éventuelle nouvelle hernie, il sera plus facile d'y accéder."
Et le Dr Daenekindt de conclure sur ce message rassurant : "De nos jours, opérer une hernie lombaire ne comporte plus guère de risques, peu importe laquelle des deux techniques est utilisée. Les patients qui doivent subir ce type d'intervention peuvent donc être rassurés."
Par An Swerts
http://www.levif.be/actualite/sante/hernie-discale-il-n-y-a-pas-que-le-bistouri/article-normal-351033.html?utm_source=Newsletter-14/11/2014&utm_medium=Email&utm_campaign=Newsletter-RNBAVULV&M_BT=593333559096