Le diabète n'est pas un long fleuve tranquille. Le blog de A.B.D - Le groupe des Personnes Diabétiques de Bruxelles hébergé Eklablog
DISPOSITIF. Les patients souffrant de diabète pourront-ils un jour utiliser des patchs indolores capables d'injecter dans la peau de l'insuline pour réguler intelligemment leur taux de glycémie ? Pas impossible à en croire des résultats publiés dans la dernière livraison des comptes rendus de l'académie américaine des sciences (PNAS), même s'ils ne concernent pour le moment que des souris rendues expérimentalement diabétiques.
Des spécialistes en génie biomédical, associés à des chercheurs de la division pharmaceutique et du centre pour les nanotechnologies de l'université de Caroline du Sud (Raleigh et Chapel Hill), ont conçu un patch cutané muni de micro-aiguilles chargées de vésicules remplies d'insuline. Le patch de forme carré, de 6 mm de côté, est composé de pointes coniques surmontées de vésicules. Celles-ci font 108 nm de diamètre et sont donc à peine plus grosses que l'épaisseur d'un cil. Elles sont néanmoins assez solides pour traverser l'épiderme.
Ces micro-réservoirs renferment de l'insuline et une enzyme, la glucose oxydase. Leur enveloppe est constituée d'un acide hyaluronique sensible à l'hypoxie, autrement dit un matériau qui devient perméable lorsque l'oxygène vient à manquer. Or, chez les diabétiques, le glucose, sous l'effet de l'hyperglycémie, présente dans les tissus, subit une réaction enzymatique qui transforme cet acide hyaluronique. C'est elle qui provoque la dissociation des vésicules qui libèrent alors leur contenu en insuline. Celle-ci est ensuite captée par le réseau lymphatique et les capillaires présents dans la peau.
C'est la première fois que l'on conçoit un dispositif de délivrance de l'insuline tirant avantage du manque d'oxygène présent dans l'environnement tissulaire en cas de taux élevé de glycémie pour déclencher une libération "intelligente" d'insuline. En effet, les autres systèmes en développement reposent sur une modification du pH local et agissent bien plus lentement.
Testé chez la souris diabétique, ce patch s'est montré capable de rapidement réguler la glycémie tout en n'entraînant pas d'hypoglycémie. La glycémie des rongeurs est revenue à la normale dans l'heure et s'est maintenue à une concentration normale pendant les trois heures suivantes, sans donc provoquer de chute dangereuse du taux de glucose sanguin. Ce dispositif s'avère donc capable de rapidement normaliser la glycémie et de la maintenir dans des valeurs normales sur des périodes prolongées. Du fait que les souris ont une moindre sensibilité que l'homme à l'insuline, les chercheurs estiment que la dose nécessaire pour contrôler le taux de glucose dans le sang des diabétiques pourrait être inférieure à celle utilisée dans leurs expériences.
Au total, la capacité de ce patch à délivrer très rapidement l'insuline encapsulée en réponse à un environnement hypoxique, sa facilité d'utilisation, son caractère indolore, de même que son excellente biocompatibilité - l'acide hyaluronique étant présent dans tous les tissus de l'organisme -, en font un dispositif qui pourrait, à terme, révolutionner la prise en charge thérapeutique des diabétiques astreints à s'administrer des injections régulières d'insuline. En 2014, on estimait que 387 millions de personnes étaient atteints de diabète dans le monde, un nombre qui devrait atteindre 592 millions d'ici 2035 en raison de l'accroissement de la population en surcharge pondérale ou souffrant d'obésité.
https://www.sciencesetavenir.fr/sante/diabete-un-patch-intelligent-a-insuline-pour-eviter-les-injections_29205