L’estragon au fil du temps
Le terme « estragon » est apparu au milieu du XVIe siècle. Il a suivi un parcours étymologique plutôt complexe, depuis le grec drakon, qui signifie « dragon » ou « serpent », par allusion à la forme de ses racines, en passant par l’arabe tarkhum, le latin tarchon, et finalement le vieux français targon.
Sous le nom d’« estragon du Mexique », on trouve parfois une plante qui n’a botaniquement rien à voir avec l’estragon. Il s’agit en fait d’une espèce d’oeillet d’Inde que les Mexicains emploient de la même manière en cuisine et qui a l’avantage d’être adaptée aux climats chauds.
|
Sous le signe de la lune L’estragon est proche parent de l’armoise et de l’absinthe, qui se caractérisent, tout comme lui, par la couleur vert gris de leurs feuilles, donnant l’impression qu’elles baignent dans la lumière lunaire. D’où, selon certains, le nom latin du genre, Artemisia, emprunté à la déesse qui règne sur cet astre.
|
Originaire du centre ou de l’Ouest de l’Asie, l’estragon était connu des Grecs et des Romains, qui en préconisaient l’emploi pour soigner les morsures de serpent et le mal de dents, tandis que les Arabes s’en servaient pour traiter la peste et le choléra. Il sera introduit dans le reste de l’Europe autour du XVe siècle où les moines le cultiveront dans leurs jardins de plantes médicinales. Les chefs français découvriront ses qualités aromatiques et le considéreront dès lors comme la reine des herbes et en feront la vedette de certaines de leurs plus célèbres sauces, notamment la béarnaise, la ravigote, la gribiche et la tartare.
Malgré sa grande popularité auprès des chefs, l’estragon a été relativement peu employé en cuisine comparativement à d’autres herbes, ce qui s’expliquerait par le fait qu’il perd une bonne partie de sa saveur au séchage et ne peut donc être offert qu’en saison. En outre, il ne se reproduit pas par les semences, mais uniquement de façon végétative (par division des racines) et sa culture est délicate. On retrouve donc souvent dans le commerce une espèce voisine, de culture plus facile, mais beaucoup moins savoureuse, soit l’estragon dit « de Russie », ce qui a pu contribuer à ternir sa réputation. D’ailleurs, jusqu’à tout récemment, les plants qui étaient vendus dans les jardineries, du moins en Amérique du Nord, étaient presque toujours de l’estragon de Russie, sans pour autant être identifiés de la sorte.
On tire de la plante une huile essentielle servant à de nombreux usages tant dans l’industrie agro-alimentaire qu’en parfumerie ainsi que dans la fabrication de liqueurs, de savons et de produits cosmétiques. Dans certains pays, l’estragon est toujours employé pour ses propriétés médicinales.
Usages culinaires
Pour accéder à d’autres recettes, vous pouvez vous rendre sur le site de recettes de cuisine CuisineAZ.com, qui propose entre autres, les recettes suivantes : sauce estragon, saumon à l'estragon, lapin à l'estragon
Bien choisir
On trouve de l’estragon frais au marché en saison, et dans les grandes épiceries tout au long de l’année. Éviter l’estragon séché, qui ne goûte pratiquement rien.
Apprêts culinaires
- Dans les soupes, notamment la soupe aux poireaux et pommes de terre.
- Dans les omelettes et autres plats à base d’oeufs.
- Dans les plats de champignons, dont il rehausse la saveur.
- Dans les salades, notamment la salade de haricots blancs, thon, poivron doux et tomates, présentée sur un lit de verdure.
- Le hacher et le mélanger avec du yogourt épais ou du fromage blanc. Servir en trempette ou sur des canapés.
- Il entre dans la composition de nombreux mélanges aromatiques : herbes de Provence, fines herbes, bouquet garni; il est souvent ajouté aux préparations de moutarde.
- Dans les sauces qui accompagnent les viandes, les poissons, les fruits de mer, les légumes grillés.
- Le poulet à l’estragon est un classique de la cuisine française : on tapisse l’intérieur de la volaille de beurre malaxé avec de l’estragon et on la cuit au four. On la sert avec une sauce composée de bouillon, d’un peu de crème fraîche et d’estragon.
- En saison, on pourra acheter ou récolter de bonnes quantités d’estragon et le mettre à macérer dans du vinaigre de vin blanc, à raison d’une bonne branche par bouteille. Porter le vinaigre à ébullition, laisser tiédir puis en remplir les bouteilles, boucher et conserver à l’abri de la lumière. Se servir de ce vinaigre pour assaisonner les salades ou déglacer une poêle.
- Les petits cornichons français sont généralement aromatisés avec de l’estragon, ce qui leur confère un parfum exceptionnel.
Conservation
Réfrigérateur : quelques jours, dans un essuie-tout ou un tissu humide.
Congélateur : ciseler les feuilles et les mettre dans un bac à glaçons en les couvrant d’eau. Enfermer ensuite les glaçons dans un sachet de plastique.
Jardinage biologique
Seul l’estragon de Russie peut être multiplié par les semences, l’estragon français, dont les fleurs sont stériles, devant être reproduit par division des racines. La première année, il faudra donc se procurer des plants en jardinerie. Par la suite, on pourra le multiplier soi-même en le divisant aux trois ou quatre ans.
Il déteste littéralement avoir les pieds dans l’eau. Choisir un endroit du jardin qui s’égoutte bien, dont le sol est moyennement riche et le pH neutre. Il peut tolérer une ombre partielle, mais préfère le plein soleil. N’arroser qu’en cas de sécheresse, en évitant de mouiller les feuilles.
C’est une plante qui a besoin de beaucoup d’espace pour s’épanouir pleinement. Compter 30 cm à 45 cm entre les plants.
Tard l’automne, recouvrir les plants d’un mulch de paille ou de feuilles mortes, que l’on enlèvera au printemps.
Écologie et environnement
L’azole fausse fougère est une minuscule plante indigène à l’Amérique du Sud qui fait l’objet d’un certain commerce dans les jardineries où on la vend comme plante aquatique. Toutefois, depuis quelques années, on la retrouve en dehors de son aire naturelle, par exemple dans les étangs et les lacs de la Colombie-Britannique au Canada où, lorsque les conditions sont favorables, elle peut se multiplier au point de menacer la survie des plantes indigènes.
Étant donné la sensibilité des milieux aquatiques aux herbicides chimiques, c’est du côté des substances naturelles que l’on cherche une solution permettant d’éradiquer cette plante ou, du moins, de limiter son expansion. Or, en 2004, des chercheurs expérimentaient avec succès un extrait de feuilles d’estragon, qui s’est avéré létal pour l’azole.
Sections L’estragon au fil du temps, Usages culinaires, Conservation, Jardinage biologique, Écologie et environnement Recherche et rédaction : Paulette Vanier
|
Coordination du contenu : Josiane Cyr, Dt. P., nutritionniste
|
Fiche mise à jour : mars 2006
|
Références
Note : les liens hypertextes menant vers d'autres sites ne sont pas mis à jour de façon continue. Il est possible qu'un lien devienne introuvable. Veuillez alors utiliser les outils de recherche pour retrouver l'information désirée.
Bibliographie
Agence canadienne d’inspection des aliments. Guide d’étiquetage et de publicité sur les aliments 2003. Chapitre 7 : Allégations relatives à la teneur nutritive. [Consulté le 15 septembre 2005]
Santé Canada. Fichier canadien sur les éléments nutritifs, 2005.[Consulté le 5 juillet 2005].
Service de diététique, Hôpital Laval. Alimentation et anticoagulothérapie, Québec, 2005.
Ars-Grin. Artemisia Dracunulus.Ars-grin.gov [Consulté le 16 mai 2005]. www.ars-grin.gov
Bowen Sandra. All about Tarragon. A Pinch of… Apinchof.com [Consulté le 16 mai 2005]. http://apinchof.com
Dauzat Albert, Dubois Jean, Mitterand, Henri. Nouveau dictionnaire étymologique et historique, Librairie Larousse, France, 1971.
Encyclopedia Britannica. Tarragon. Britannica.com [Consulté le 16 mai 2005]. www.britannica.com
Ferland G., Bertrand B., Potvin S. Régime contrôlé en vitamine K. Dans : Chagnon Decelles D., Daignault Gélinas M., Lavallée Côté L. et coll. Manuel de Nutrition Clinique, 3e éd. Montréal, Ordre professionnel des diététistes du Québec, 2000.
Gilbert Linda. Tarragon. Sallys-place.com [Consulté le 16 mai 2005]. www.sallys-place.com
Grieve M. Tarragon. A Modern Herbal. Botanical.com [Consulté le 16 mai 2005]. http://botanical.com
Growing Taste. About Tarragon. Growingtase.com [Consulté le 16 mai 2005]. http://growingtaste.com
Hartwell Sharon. What is that stuff covering the water? E-Flora BC Botanical News and Notes.Geog.ubc.ca [Consulté le 18 mai 2005]. www.geog.ubc.ca
Katzer Gernot. Sage. Gernot Katzer’s Spice Pages. [Consulté le 16 mai 2005]. www.uni-graz.at
Kiple Denneth F, Ornelas Kriemhild Coneè (Dir.) The Cambridge World History of Food, Cambridge University Press, Grande-Bretagne, 2000.
Mansfeld’s World Database of Agricultural and Horticultural Crops. Satureja montana.Mansfeld.ipk-gaterslebe.de [Consulté le 16 mai 2005]. http://mansfeld.ipk-gatersleben.de
Oduro C., Hatcher P., Newman J. Control of red water fern (Azolla filiculoides) using tarragon(Artemisia dracunculus) and mugwort (Artemisia vulgaris) leaf extracts. European Weed Research Society. Ewrs.org [Consulté le 18 mai 2005]. www.ewrs.org
Simon, J.E., Chadwick A.F., Craker L.E. Herbs: An Indexed Bibliography. 1971-1980. The Scientific Literature on Selected Herbs, and Aromatic and Medicinal Plants of the Temperate Zone, États-Unis, 1984. In: Hort.purdue.edu [Consulté le 12 mai 2005]. www.hort.purdue.edu
Tannahill Reay. Food in History, Three Rivers Press, États-Unis, 1988.
Toil’d’épices. Estragon. Toildepices.free.fr [Consulté le 16 mai 2005]. http://toildepices.free.fr
Toussaint-Samat Maguelonne. Histoire naturelle et morale de la nourriture, Bordas, France, 1987.
Notes
1. Campanella L, Bonanni A, Favero G et al. Determination of antioxidant properties of aromatic herbs, olives and fresh fruit using an enzymatic sensor. Anal Bioanal Chem. 2003;375:1011-1016.
2. Ninfali P, Mea G, Giorgini S et al. Antioxidant capacity of vegetables, spices and dressings relevant to nutrition. Br J Nutr. 2005;93:257-266.
3. Zheng W, Wang SY. Antioxidant activity and phenolic compounds in selected herbs. J Agric Food Chem. 2001;49:5165-5170.
4. Kavvadias D, Abou-Mandour AA, Czygan FC et al. Identification of benzodiazepines in Artemisia dracunculus and Solanum tuberosum rationalizing their endogenous formation in plant tissue. Biochem Biophys Res Commun. 2000;269:290-295.
5. Watanabe J, Shinmoto H, Tsushida T. Coumarin and flavone derivatives from estragon and thyme as inhibitors of chemical mediator release from RBL-2H3 Cells. Biosci Biotechnol Biochem. 2005;69:1-6.
6. Swanston-Flatt SK, Flatt PR, Day C et al. Traditional dietary adjuncts for the treatment of diabetes mellitus. Proc Nutr Soc. 1991;50:641-651.
7. Swanston-Flatt SK, Day C, Bailey CJ et al. Evaluation of traditional plant treatments for diabetes: studies in streptozotocin diabetic mice. Acta Diabetol Lat. 1989;26:51-55.
http://www.passeportsante.net/fr/Nutrition/EncyclopedieAliments/Fiche.aspx?doc=estragon_nu