Le syndrome du nez vide, une maladie invisible
Syndrome du nez vide ? À première vue, difficile en effet d'imaginer de quoi il est question. Et c'est là tout le mal dont souffrent les personnes atteintes : la méconnaissance… et le
manque de reconnaissance.
Pour tenter de comprendre le syndrome du nez vide (SNV), mieux vaut s'armer de patience et de prudence car ce syndrome est aussi complexe à cerner qu'il l'est à expliquer. Et pour être sûr de ne
vraiment pas passer à côté, l'idéal est encore de faire appel à un expert en la matière et aux principaux intéressés : des patients.
Le syndrome du nez vide, kesako ?
Sous cette appellation barbare se cache une affection sournoise.
Mais pour comprendre le syndrome du nez vide, il est essentiel de commencer par expliquer la fonction des cornets du nez. Au nombre de 3 par narine (le cornet supérieur, le cornet moyen et
le cornet inférieur), leur rôle est d'humidifier la muqueuse, de filtrer l'air et de le mettre à bonne température pour le diriger ensuite vers les poumons.
En cas de sinusite chronique ou de gêne respiratoire chez un patient, et seulement lorsque les traitements locaux n'ont
donné aucun résultat, on peut envisager une turbinectomie partielle, unilatérale (voire bilatérale et
exceptionnellement totale), c'est à dire qu'on va diminuer de façon irréversible et définitive la taille des cornets responsables des infections et/ou de l'obstruction.
Le problème, c'est qu'il arrive que la turbinectomie, un acte très fréquent en ORL (34ème
acte en ORL dans les statistiques de la Sécurité sociale), aggrave la condition du patient au lieu de l'améliorer ou de la guérir complètement.
Le SNV, une complication extrêmement rare
Car si la turbinectomie ravit les patients dans 98 % des cas, une infime minorité se plaint d'en ressortir avec des symptômes invivables. C'est le cas de Mohamed. A 25 ans, quand il
consulte un ORL pour des maux de tête fréquents, des sinusites et le nez qui coule parfois, on lui "vend" - selon ses propres termes - une intervention sûre à 100 %, mais sans jamais
mentionner les cornets du nez : "si on m'avait expliqué le rôle des cornets dans la respiration, je n'aurais jamais accepté l'opération". Un an après l'intervention, les premiers symptômes
apparaissent : "la sensation qu'on vous étrangle, la fatigue, l'impossibilité de supporter le froid...".
Pour le Dr Jean-Michel Klein, ORL, ces symptômes sont dus à la complication (très rare) d'obstruction paradoxale : "Si on enlève trop de cornet, on peut créer une béance trop importante
qui peut être à l'origine de soucis d'infection osseuse ou de rhinite atrophique comme dans le cas du syndrome du nez vide. Si le nez n'est plus obstrué, il est en revanche trop sec et la
muqueuse ne supporte plus le passage d'air".
A 34 ans, la souffrance est telle que Mohamed a dû arrêter de travailler. Mais il n'est pas au bout de ses peines… Tout comme la centaine d'autres malades répertoriée par l'association
Syndrome du Nez Vide France (www.syndromedunezvide.org), il affronte aujourd'hui le problème de la reconnaissance du SNV par le
corps médical.
Aucune reconnaissance médicale du SNV
Comme Mohamed, Christine, 50 ans, a perdu une grande partie de ses cornets après deux séances de radiofréquence pour traiter un nez constamment bouché et des ronflements. Et comme lui, elle est aujourd'hui en arrêt maladie faute de traitement pour atténuer ou soulager ses
symptômes : essoufflement, brûlures, douleurs, sommeil, sensation d'étouffer... Face à l'absence de réponse des ORL qu'elle a consultés, c'est sur un forum internet consacré à la rhinite allergique qu'elle a compris de quoi elle souffrait : "Je prends des antidouleurs quotidiennement et durant la nuit, je porte un masque humidificateur que m'a donné un pneumologue. Ce
n'est pas seulement ma vie mais aussi celle de mon mari, de mes enfants qui est fichue car je ne peux plus partir en vacances et je ne sors plus par peur des changements de température".
Une souffrance invisible pour l'entourage des malades et d'autant plus difficile à faire accepter qu'elle n'est pas reconnue. Mohamed, lui, avoue même n'envisager que deux issues à sa
situation : "Le suicide ou la folie. Personne ne nous croit puisqu'on ne voit rien. Un ORL m'a même dit récemment que tout ça c'était dans la tête et qu'il valait mieux que j'aille
consulter un psychiatre".
Pour le Dr Jean-Michel Klein, inutile d'interdire la turbinectomie puisqu'elle améliore la condition d'une très grande majorité de patients. La solution selon lui : "il faudrait
anticiper le dépistage des patients qui vont évoluer vers un SNV post chirurgie des cornets".
En attendant des études sur le sujet et la mise au point d'un traitement, Mohamed, Christine et l'association Syndrome du Nez Vide France continuent de se battre pour faire reconnaître le
syndrome du nez vide par le monde médical.
Anne-Flore Gaspar-Lolliot, le 15 novembre 2011
Sources :
- Interview du Dr Jean-Michel Klein, le 3 novembre 2011
- Entretien téléphonique avec Christine, le 7 novembre 2011
- Entretien téléphonique avec Mohamed, le 8 novembre 2011
- Données obtenues auprès de Nadine Bouhedda, Présidente de l'association SNV France (Site de l'association www.syndromedunezvide.org)
- Site de l'association www.emptynosesyndrome.org
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http://www.doctissimo.fr/html/dossiers/troubles-orl/articles/15322-syndrome-nez-vide.htm